Le prof de musique
Il entrait tôt, les yeux en veille,
Un peu froissé, la voix en treille.
Dans sa classe, y’avait pas d’mur,
Juste des silences, des cœurs trop purs.
Il disait rien, il attendait,
Que le vacarme enfin se taise.
Un regard doux, un mot discret,
Et l’indiscipline devenait braise.
C’était pas un prof, c’était un souffle,
Une guitare entre deux doutes.
Il semait des notes dans les foules,
Et redonnait du sens aux routes.
Il chantait pour ceux qu’on oublie,
Et ceux qu’on juge sans mélodie.
Le prof de musique.
Il parlait peu, mais ça vibrait,
Comme une corde qu’on n’accordait.
Il voyait clair dans le chaos,
Les mômes en vrac, les egos clos.
Il notait pas, il écoutait,
Un souffle faux, un cri brisé.
Il disait : “Chante, même si t’as peur,
Ta voix mérite un peu d’ardeur.”
C’était pas un prof, c’était un phare,
Sous les néons, loin des étendards.
Il rallumait ce qu’on éteint,
Un feu discret, un lendemain.
Il croyait fort dans l’impossible,
Et dans les mômes qu’on dit fragiles.
Le prof de musique.
Et puis l’usure, comme une rature,
Lui a volé ses partitures.
Il a fermé la salle un matin,
Le cœur en vrac, mais pas pour rien.
C’était pas un prof, c’était une chance,
Une dissonance, une présence.
Il a laissé des harmonies,
Dans les silences, dans les oublis.
Et dans un coin de mélodie,
Y’a sa voix douce qui retentit.
Le prof de musique.
