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Sébastien BROUCKE

Antinéa

Là-bas, dans les sous-bois, dans la pénombre austère,
Courent les souvenirs qui contaient notre histoire,
Passant main dans la main sous des branchages noirs,
Ces fantômes s’en vont, deux par deux, solitaires.

Fuyant ce qui me hante, éclipsant ma jeunesse,
De la maison sans vie ils s’éloignent du seuil,
Enivrés à mes joies ils vomissent le deuil,
Qui me monte du cœur à trop grande vitesse.

Les jours de grand ciel bleu sont éteints, c’est la nuit,
Je m’éclaire à la lune, irréversiblement,
Et zébrant mon sentier comme un pressentiment,
Une ombre lente et floue tremble au temps que j’essuie.

La vie m’a préservé de beaucoup de misères,
Et je ne souffrais pas de ce qui me manquait,
Indocile, insoumis, j’aurais sans abdiquer
Pu vieillir bienheureux sans changer mes repères.

Une heure à ton soleil a délavé mes yeux !
Oui, sous tes longs cheveux comme une étoile en fête,
Déchirant mon espace ainsi qu’une comète,
Tu brûlas mille feux dans mon ciel de banlieue.

Aujourd’hui je survis, bien malheureusement,
Les signaux sont au vert, mon état stationnaire,
Je tourne dans mon lit, je pose un pied à terre,
Et le passé visite un pitoyable amant…

J’aurais tant désiré ne jamais m’en sortir,
Étreint par une corde embrasser les cieux vides,
Mais ils m’ont ramené dans ce monde livide,
Où plus un seul prénom n’embaume l’avenir.

Ils m’ont remis debout pour aller de l’avant…
Où voudrait-on que j’aille, amputé de la joie,
Je n’ai plus qu’à mourir une seconde fois,
Maudissant dans ma nuit tous les soleils levants !


Je n’ai rien à laisser ! L’absence ? Une vétille !
En filant sous les fleurs des pulls aux asticots,
Je craindrais moins l’enfer que ces coquelicots,
Parlant encor de nous dans l’herbe qui scintille.

Mon énergie faiblit, je descends, je m’écrase,
Je m’abîme, je sombre, et tel un satellite,
Vieillir me fait déchoir, vivre me désorbite,
Car à quoi bon ce ciel si tes yeux ne l’embrasent…