" La rose blanche...", Chant 1 " La douce vendredi "
        
 Le soleil scintillait sur le Guadalquivir,
 Répondant au Salât de l’argenté Takbir,
 Tels les flancs écumeux de l’imposant taureau
 Qui, brisé par l’effort, soupire en son repos.
Le jeune ben Adam, dressé sur son séant
 Dans le patio de Sahm, en bon et pieux orant
 Qui ne s’égare pas, répond aux cinq fontaines
 Par la mère du livre. Incline sa misaine
 Une première fois, et plonge, orbe fermé,
Jusqu’à sentir le sol sous son front respirer
 Toute l’incantation au miséricordieux,
 Telle une âme assoiffée que l’on prend pour aïeux.
 L’office terminé notre jeune érudit
 S’adonne alors au zikr, prélude au double cri
 Extatique soufi. Puis, les larmes coulant
 Sur sa joue amoureuse, il parle au firmament,
 D’un ton révérencieux, comme l’eut fait Farhâd
 A la reine Chîvin, devant le grand Bagdad:
 «  Comblés sont les croyants écartés du verbiage,
Emplis d’humilité, témoignant de l’adage:
 Par le nom de Celui, le tout miséricorde,
 Le miséricordieux ! Dans la nuit de discorde
 Et le jour éclatant se gonfle ta poitrine,
 Au passage de Dieu, jusqu’à l’aube divine !
Car trouvé orphelin, Amour Il te guida !
 Car trouvé dans l’errance, Amour Il t’abrita !
 Ainsi à l’orphelin ne fais jamais violence !
 Ainsi que ne repousse et mendiants dans l’errance
 Et l’homme sans maison; mais tel qu’Il fut pour toi
Chante l’allégeance jusqu’au faîte du toit. »
 Sitôt larme asséchée sur son front pointé haut,
 De l’orangé tout près Parnassuis Appolo
 Descendit le rejoindre en caressant l’éther
 De ses écailles d’or. De même qu’un éclair
Fait transpirer l’umbra en éveillant la nuit,
 Un rai illumina la douce Vendredi,
 Parti de l’animal sur l’épaule agrippé,
 Jusqu’au Coran géant de rubis incrustés.
 L’éponyme du dieu consacré à Délos,
Ami de Jésus-Christ et fils de Hyahinthos,
 De sa voix claire et douce expliqua la vision:
 «  Mon tendre ben Adam tu ne perds la raison !
 Car c’est moi, Gabriel, qui sur ordre du père
 Est venu te convier à mirer son mystère.
Longe la palmeraie suivant mon étendard,
 Jusqu’au mihrab faussé à l’œil toujours hagard. »