Madame de Citrouille en son bel habit d’or S’étalait au jardin avec trop d’insolence Écrasant sans pitié tous ceux qui, c’est leur tort Croissent modestement avec quelque indolence
Elle les contemplait du haut de sa grandeur Prenant la liberté de se croire importante Ainsi, comme au jardin, les hommes querelleurs Toisent quelque voisin de façon méprisante...
Le melon s’esbaudit de cette suffisance La courgette s’esclaffe et la salade aussi. Le céleri, béat, rit se tenant la panse Mais le chou est vexé et fronce le sourcil !
La cucurbitacée s’offusque de ces rires Et, pleine de mépris, étale ses rondeurs Puis, s’enflant un peu plus pour exprimer son ire Parvient à écraser le beau pied d’un chou-fleur !
Flotte alors dans les rangs un parfum de vengeance Les légumes, outrés, se concertent tout bas : Il faut, de l’effrontée, fustiger l’insolence Rabattre son caquet ! Alors, tous au combat !
« J’en appelle au chiendent « crient en chœur les tomates Et leurs petites voix réveillent l’escargot. La limace, alertée, arrive tout de go Et la guêpe, intriguée, survient aussi en hâte
Le concombre masqué assomme la pécore Le chiendent la ligote. Arrive l’escadron Des animaux sommés en vaillants bataillons Qui l’attaquent, la rongent et encore et encore !
L’opulente citrouille a perdu tous ses charmes Où donc est sa superbe et son front si hautain ? Sur sa beauté fanée elle verse des larmes On ne l’entendra plus dénigrer ses voisins !
Moralité : Il est bon de savoir combattre le dédain De moucher vertement celui qui vous rabaisse Savoir avec esprit l’attaquer tout soudain Le faisant retomber lourdement sur ses fesses !