« Quoi, qu’avez-vous donc dit ? » s’offusquait la faisane Répondant vertement au fastueux dindon Qui derrière le dos de la brave paysanne Venue leur apporter la provende à foison
Essayait, mais en vain de lutiner la poule En lui offrant son cœur niché sous un jabot Arrogant, orgueilleux qu’il montrait à la foule Des poules assemblées et qui le trouvaient beau…
Seule, notre futée le voyait ridicule Enflé de vanité autant qu’un coq, ma foi, Et même le violet foncé des caroncules Du vaniteux dindon, provoquait son effroi !
« Fi donc, monsieur, rétorquait la mignonne Aux propos licencieux du butor emplumé, Je n’ai pas la pudeur ni l’âme d’une nonne Mais vos gestes grossiers, votre voix enrhumée
Altèrent mes ardeurs ( si tant est que j’en eus) Sachez que pour aimer, il faut de la tendresse Vous êtes un soudard : ah, n’y revenez plus ! » Et la poule parvint avec délicatesse
A échapper enfin au dindon glougloutant Dont la sombre livrée faisait piètre figure En ses plumes de deuil d’un noir désespérant A côté d’un pourpoint rebrodé de dorures !
(Mais quel est ce pourpoint dont vous nous parlez-là ?) Imaginez un peu que cette pimprenelle Vivant au poulailler et ne s’y plaisant pas Lorgnant le coin du bois d’une triste prunelle
Aperçut un matin, un vrai prince charmant : Un faisan, en effet, mâle des plus superbes Voyant au poulailler s’étioler doucement La faisane jolie, s’aventura sur l’herbe
Tout près de cet enclos où l’humble créature Subissait les assauts du vieux libidineux. Ah, faisane chérie, sur ma tête, je jure De t’arracher un jour à ce destin honteux !
Parle ainsi le galant et faisane se pâme Et nos deux amoureux tous les deux enflammés Accordent leurs pensées et enlacent leurs âmes, Leurs destins s’épousant, se liant à jamais …