La cucurbitacée exposait au chalands La beauté de ses flancs au ventre prolifère Tout vert de jalousie, le poivron enrageant Dit à tout un chacun : « Oh,la grosse exagère ! »
La grosse, dites-vous, réplique la citrouille Avez-vous regardé votre piteuse bouille Qui verte de dépit me fait vraiment pitié Pourquoi affichez-vous autant d'inimitié ?
Est-ce donc ma couleur dont vous êtes jaloux Ou bien la chair tendue de mes charmantes joues ? Le poivron radouci par ces calmes propos Sent fondre sa colère et réplique aussitôt :
Excusez – moi ma mie et que Dieu me pardonne D'avoir flétri ainsi l'or de votre couronne Je suis bien maladroit et cette acrimonie Vient du fait que c'est vrai, souvent je vous envie !
Je me sens étouffer dans ma peau trop étroite Je me crois enfermé comme dans une boîte Et vous, en vos rondeurs, vous êtes séduisante Pour tout vous avouer je vous trouve épatante !
La citrouille sourit à ce revirement Et du poivron penaud accepte l'allégeance Lui disant aussitôt avec quelque élégance : Appréciez votre état, car vous êtes charmant
Et de vos qualités il ne faut point médire Chacun doit ici – bas se sentir important Sans se hausser du col , hein, cela va sans dire ! Le poivron rassuré sourit et se détend...
Et la paix qui revient sur le petit marché Nous interpelle, à nous, hommes peu sages Qui gouvernons bien mal nos passions, à tout âge !