Dans l’océan des mots, j’avance à pas comptés Car bien des chausse –trapes s’entrouvrent sous mes pieds ! J’ai peur des mots requins qui parfois me galopent Les mots sales, mesquins qui rendraient misanthrope
J’ai peur des mots grossiers peignant la volupté : Obséquieux, tentateurs, ils me feraient chuter. Le mot sexe me fait rougir jusqu’aux oreilles J’ai toujours peur du majordome, qui surveille
Si ma langue est bien propre et mes dents astiquées Et si je me nourris de mots bien mastiqués Si mon dos se tient droit lorsque je suis à table, Qui veut que mon maintien soit toujours respectable !
Je crains les mots fripons dont on se gargarise Couchés dans les fourrés, à l’abri des surprises Et qui, bien qu’habitant la langue de chez nous, Nous font passer aux yeux des gens pour des voyous !
Et les mots désignant les précieux attributs De ces mâles ardents, fierté de nos tribus, Croyez-vous que ma bouche, à les dire s’avance ? Ma pudeur ne le veut, et non plus ma conscience !
Faut-il se résigner à être aussi bégueule A une époque où, même les femmes, veulent Agir comme les hommes, et cherchent dans les mots Des piments souverains fouettant leur libido !
J’aime les mots sucrés de la délicatesse Dans les jeux de l’amour, et là, je le confesse Je perds totalement mes inhibitions : N’est-ce pas l’essentiel, dans cette discussion ?