Ah que la fraise est douce et sa chair veloutée ! De la crème bien sûr, on peut lui rajouter: Tous les plaisirs sont bons à cette pimprenelle Qu'on se plaît à manger assis sous la tonnelle!
Mais qu'entends-je , qu'ouïs-je en ce salon trop blanc Une fraise soudain qui s'en prend à mes dents? De la douceur du fruit on ne parle plus guère La crème est oubliée sur la banquette arrière!
Je suis là, bouche bée, une serviette au cou Je déglutis un peu: mais quel drôle de goût! Et ce bruit lancinant qui ébranle ma tête Que faire, à quoi songer? Mais voyons, je suis bête!
Je n'ai plus qu'à rêver à la reine de mai La fraise des jardins qui hier soir embaumait L'espace préservé de ma fraîche cuisine Pendant que sans pitié, ici l'on me cuisine!
Je la vois enrobée de neigeuses collines Et j'oublie derechef le raffut des turbines Je la saupoudre enfin de sucre vanillé Et je ferme les yeux pour mieux la déguster!
Quoi, c’est déjà fini? Du fauteuil je m'extrais Et souris au docteur qui me dit stupéfait: Votre calme est parfait! Vous m'en voyez fort aise! -Ne vous étonnez pas: c'est à cause des fraises!
Le dentiste ébahi n’a jamais rien compris Mais m’a fait une fleur : j’ai payé moitié prix !