Le jardin, épuisé, mène dure bataille Mais on craint de le voir expirer peu à peu Déjà les gros melons se fendillent et bâillent, Jamais, au grand jamais, on ne vit pareil feu !
Le soir arrive enfin et le soleil se couche, Un petit vent se lève et l'on peut respirer, Les légumes, défaits, aspirent à la douche Qu'une main dévouée va leur administrer !
Le pas du jardinier, sur la terre résonne : Les plantes, soulagées, sortent de leur torpeur Et soudain, ô délices, voici en personne La fée, la douce fée qui ranime les coeurs.
Elle tombe sur eux en goutelettes fines En caresses osées, en murmures de soie Anges et Séraphins et même Séraphines Ne peuvent prodiguer plus d'amour et de joie !
Le frais ruissellement imbibe les carcasses Booste les téguments, regonfle les vaisseaux Les tiges qui flanchaient, avec fougue enlacent Les pieds de leurs tuteurs et grimpent de nouveau.
La carotte ravie, sous la terre s'ébroue, La racine s’abreuve et en frissonne d'aise On entend un bruit doux, un clapotis de boue Comme ferait la chair d'une joue que l'on baise.
Le jardin fait la cour à cette eau salvatrice Qui le gorge, et le comble, et apaise sa faim Et la nuit qui survient, belle ombre séductrice Ramène enfin la paix dans le petit jardin...