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Jean-Michel BOLLET

Lambert

Hé ! Lambert ! Approchez ! Prenez son revolver,
Coupez sa ceinture et sa paire de bretelles
Afin que ses cuisses baisent le fol hiver
Après avoir frôlé les robes de dentelles.

Allez-y, nom de dieu, n’ayez pas de scrupules
Si vous voulez savoir comme est fait l’ennemi ;
Comment fut conçu le plus cocu des crapules
Qui, sous la menace de la lame a blêmi.

- Sergent, j’ai désarmé cet homme moribond
Qui dans deux minutes, aura cessé de vivre ;
Son visage est déjà noir comme du charbon
Et sur ses cheveux courts, il est tombé du givre.

- Vous parlez trop, Lambert ! Agissez sans tarder.
Le combat à mener est celui de la guerre ;
Nous sommes en train de nous faire canarder
Et vous philosophez : tout ça ne me plaît guère.

Donnez-moi le couteau et finissons-en vite :
Je me fous de ce qui retient son pantalon ;
Si je lui troue jusqu’au cou le ventre, j’évite
De le voir à poil du bassin jusqu’au talon.

- Sergent, n’en faites rien ; faisons-le prisonnier :
Il n’a plus d’arme au poing ; il ne peut se défendre
Et puis il a peut-être envie de communier
Avant que son cœur par la peur vienne à se fendre.

- Prisonnier ? Menotté ? Que veux-tu que j’en fasse ?
Je devrai le soigner, le nourrir, le prier
De ne pas me cracher son venin dans la face ;
Bref, je crains qu’il parvienne à me contrarier.

Ah ! ces sottes pensées ! Assez, assez, Lambert !
C’est à vous ou à moi que revient la besogne
Et nous n’irons pas dans un roman de Flaubert ;
Autant que ce soit lui qui sente la charogne.

- Bordel de Dieu, sergent, il s’enfonce une lame
En plein dans le cœur et en hurlant de douleur ;
- Laissez le faire, il se perce la chair ; j’acclame
Cette douceur qui donne aux joues de la couleur.