Au pays des aveugles Les borgnes sont rois Me dis-tu tandis Que je file doux Comme glissent les doigts Sur un drap de velours
Tu me répètes A l’envi Marche à l’ombre Marche à l’ombre Mais je ne réponds pas Je poursuis
C’est au pays des amours Que les aveugles prennent Leur ultime revanche Un humble papillon Est bien assez lourd Pour y mettre à mort D’un simple coup d’ailes La logique implacable Et la raison fidèle
Mais tu reprends ta ritournelle Marche à l’ombre Marche à l’ombre Quand donc te tairas-tu
Le soleil m’éblouit Je sue Je sue Je cherche un abri A la chaleur intense Des brûlants rayons Du soleil d’été Je tente de raser Les murs des maisons Qui bordent l’avenue Et depuis ta fenêtre Ouverte sur le monde Tu ne cesses de répéter
Marche à l’ombre Marche à l’ombre Gare à la dislocation Ou la dissolution de l’être
Eh bien c’est entendu Que l’on m’offre donc Au bout de la rue L’évidente efficacité De la fraîcheur d’une forêt sombre Et de milliers de glaçons Ou de cette froidure Mordante du vent d’hiver Qui pénètre la chair Et qui donne des frissons