Quand la rage d'écrire Te brûle le ventre Demande au premier inconnu Qui passe Qu'il casse Tes doigts Ou te broie Les phalangettes Comme une meule écrase les grains L'oeuvre la plus belle enfin La plus précieuse sans conteste Sera celle que grâce A lui tu n'auras pas écrite
Allégé d'un fardeau Tu vas courir plus vite Et libre enfin Dans les champs de blé mûr Dans la forêt hantée Dans les chemins minés Dans le sang des batailles Et la terre humiliée Par d'incessants combats Dans les couloirs de l'asile Où tu dérailles Depuis longtemps déjà
Tu vas marcher léger Sur les flots De la mer démontée Sans couler Sans t'arrêter pour pêcher Des poissons qui ne mordraient même pas Quels que soit les appâts Que tu comptes lancer
Tu vas pouvoir bientôt chanter La Carmagnole sous le balcon Du palais royal Ou te trémousser dans l'herbe tendre En compagnie d'un lot de princesses Qui ne demandent qu'à Se faire pincer les fesses Peinées de n'être guère Sollicitées d'ordinaire
Tu joueras le rôle dévolu à Tarzan Te balaçant D'une liane à l'autre Dans la brousse béarnaise
Heureux Heureux Esprit libre enfin heureux Dans la France profonde Tu prendras tes aises Et si Dieu le veut On te vénérera Tu rejoindras un jour Mort par le corps