Laissez-moi tranquille Vous savez bien que je ne peux rien changer A l’effacement des maisons de la ville Qu’il m’est impossible de modifier L’étrange volonté de gommer les toits Les murs Les arbres et les fleurs des jardins Publics et privés
La face rougie Comme enfiévrée Le vent n’y est pour rien Les mains jointes Les yeux embués Vous me suppliez
Je ne puis et de loin Corriger le plan divin Mais je compatis à votre douleur Comme ces pigeons qui ont cessé Depuis longtemps de roucouler Ou la marchande des quatre saisons Qui pleure discrètement sous le balcon De l’étude du notaire
Je ne perçois à présent Pourquoi le taire Que des cris stridents Nés des douleurs brûlantes Des plantes arrachées
On dit que Selon toute vraisemblance Il ne doit demeurer De ces lieux en souffrance Que nos souvenirs d’enfance Et la bonne du curé Dévêtue Siphonnée Qui danse Qui danse Hautaine et fière Un tantinet lascive Dans les allées du cimetière Dont les tombes seront Bientôt désaffectées
La ville se meurt On va bientôt La rayer de la carte Un poète ami S’écrie Ô mon pays natal On te crucifie On te crucifie Puis il s’élance à travers champ Sur un cheval au galop A la vitesse du vent