Le portrait d’un oiseau qu’on ne peut pas dessiner… A Jacques Prévert
: Jacques Prévert – Pour faire le portrait d’un oiseau
« Pour faire le portrait d’un oiseau Peindre d’abord une cage ?... » Tu m’aurais dit : « Dessine-moi l’Oiseau !... » Ça aurait été plus simple sans le cageot…Car voilà, - Je dois d’abord faire le Ciel, Les nuages (ne peuvent pas rentrer dans une cage !) Les Étoiles, les rayons du Soleil…avec lesquels l’Oiseau parle Chaque matin, au réveil ! - Je dois ensuite faire La Terre, La Mer Pour que ses yeux puissent voir (dans leur vol, de travers) Des montagnes, des plaines, quelques fleurs arrondies Pour donner à ses ailles cette unique envie De planer chaque jour par-dessus la Planète (Encore, et encore, dans un cercle sans fin…)
« Dessine cette Oiseau – plus vite, vas-y ! » - Mais je dois d’abord dessiner quelques bruits… Que les feuilles des arbres font lorsqu’elle passe Invisible – dans cette peinture Et Il ne reste plus beaucoup de place ! Pour peindre maintenant ses ailles… Elles sont déjà dans le vent qui se lève, s’envole… (Le vent, c'est le vent qui se forme en elles…)
« Il est où cet Oiseau ? Son portrait l’as-tu fait ? » - Pas encore, je dois d’abord dessiner Le vol ! Ce vol au-dessus du dessin Que la plume n’arrive à attraper dans sa main Que toutes les cages (même le plus dorées) Même cachées dans l’arbre, ne sauront attraper !
Tu dirais : « mauvais signe » qu’il est mauvais ce tableau Il lui manque l’essentiel : il n’y a pas d’Oiseau !!! (Et aussi, pas de plume pour pouvoir signer… Dans un coin du tableau…mon nom passager ?)
Pourtant, Mon Oiseau, tu l’as vu, à l’instant ! Tu étais dans son œil, dans son cœur même, volant… Au-dessus de ce Monde, à peine esquissé Merveilleux, seul Oiseau, qu’on ne peut pas dessiner…