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Giovanni BENINI

Sots d'homme

Le long cortège avançaient dans un cimetière
De mornes ferrailles où rouillaient des viscères
Qui grinçaient dans les vents secoués d’épouvante
Sous l’oeil crevé d’un ciel et ses plaintes sifflantes,

Des carcasses pourries aux grimaces funèbres
S’érigeaient en décor aux enfants des ténèbres,
Des sinistres rumeurs erraient dans ces décombres
Tels des spectres chagrins qui ont perdu leur ombre,

Que furent ces débris sinon quelques idoles
Adulées un instant par de creux somnambules,
Fêtards impénitents, friands de farandoles
Maintenant avachis au coeur du crépuscule,

Des couinements de rats, des chuintements de tôles,
Le rire d’une hyène au milieu des guimbardes,
Une rombière nue se noyait dans la gnôle,
Un geek numérisé initiait des tocardes,

Des saltimbanques sourds s’enroulaient dans des pneus
Sous l’aveugle regard d’une voyante en deuil,
Des homards cramoisis pourchassaient écumeux
Les banquiers adipeux qui les suçaient à l’oeil,

Des chimères clonées par des laborantins
Collaient leurs ventouses aux chignons des joggeuses,
Sous les gouailleries aux odeurs de muqueuses
De cybernanthropes friands de diablotins,

Tandis que les hâbleurs, artistes présumés,
Poussaient des cris d’Apache autour d’un perroquet
Sculpté en excréments d’éléphants chichiteux,
VIP subornés aux vernissages creux,

Sur un tas de Kleenex et de journaux jaunis,
Les communicateurs au rictus botoxé
Annonçaient sans émoi l’agonie des forêts,
La chute du soleil au fond d’un tsunami,

Des immondes égouts crapahutaient geignards
Quelques doyens pervers en chasse de chiots,
En ces jours avachis, la jeunesse était rare!
On la voyait parfois trotter dans le métro,

Accoudée au comptoir d’un zinc démantelé
La cantatrice chauve assimile en apôtre
Le bulbeux requiem d’un tueur suicidé
Piégé par un miroir où il voyait un autre,

Effroyables visions, ô villes purulentes,
La hideuse folie y règne à tout jamais,
Chaque vice est vertu, le mal est un bienfait,
La guerre est une paix et la mort une amante…