Les nypeuriens
On n’y peut rien si comme Icare,
Le vol, on l’aime au quotidien,
Sous un soleil dipsomaniaque
Intoxiqué au kérosène,
Si ses rayons crament les bois,
Les boas d’or et les aras,
Les Kayapos et les pumas,
Sachez que grâce à nos clichés
De smartphones de Tantale,
On aura immortalisé
La brousse et ses cris calcinés,
Les cornes d’éléphants en flamme
Et les crocodiles bigames,
On n’y peut rien, honnis pour rien!
Si l’asphalte asphyxie l’humus
Tandis qu’à bord de nos cercueils
En sueur, on se gratte l’anus,
Ça crapahute et ça klaxonne,
Ça vocifère et ça bourdonne,
Tout ça pour se péter la panse
Aux hammams en effervescence,
Tous en choeur, on miaule un refrain:
« Merci à vous, les Saoudiens,
Grâce au pétrole, on se fait du bien,
Partout, on pollue en démocrates,
Confessés par Ponce Pilate ».
On nie pour rien, on n’y peut rien
Si on a peur du lendemain
Alors comme des étrilles bleues,
On pille tout peu scrupuleux,
Avec nos pinces de pirates
Valsant dans nos vastes frégates,
On laboure le ventre vert
De ce qui fut un jour la mer,
Ensuite, on fourrage la terre
Pour lui extorquer ses trésors
Engrangés dans nos sanctuaires
Pour le futur de nos aïeuls
Ou le passé de nos filleuls.
On nique pour rien, nous, Nypeuriens,
Qui était las, quand j’étais là,
Qui s’est sauvé quand j’étais prêt,
Qui a laissé son beau bustier
Sur le divan de mon voisin?
Avec le temps, on le sait bien,
On ne reconnaît plus les siens,
Peut-être ne l’étaient-ils pas,
Peut-être n’étais-je pas moi,
Mais dans le miroir quel enfant
Chaque jour s’éloigne en musant
Et me fait signe tristement?
On n’y peut rien ou bien si peu
Mais soit soyons de bonne foi,
On pourrait mieux, c’est un aveu
Peut-être une prochaine fois?
