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Giovanni BENINI

Les loges de la phobie


Perturbateur endocranien, myriapode tétanisant, ophidien protéiforme,
La phobie assaille l’encéphale et l’enferme affolé dans une camisole, sans force.
En ces temps où triomphe l’homo festivus (quoiqu’en sous-effectif immune), jamais n’auront tant fleuri les formes de phobie.
En voici un catalogue raisonné:
A l’acrophobe paralysé sur son échelle branlante répond le coulrophobe qui se sent suivi par des échasses ricanantes à tête de clown,
Le photophobe fuit la lumière et ses poignards brûlants, l’achluophobe la supplie quand tombe la nuit dans un vacarme assourdissant,
Le géphyrophobe restera des années, paralysé devant ce pont alors que s’éloigne son aimée poursuivie par une araignée,
Tel Robinson, l’agoraphobe cherche son île, l’autophobe, lui, se rue, hurlant, bras ouverts vers une foule sidérée,
Si le spectrophobe ne peut chanter l’air des bijoux, le sciophobe n’éclaire plus sa lanterne,
L’ithypallophobe déteste la choucroute, les cornichons et les asperges (sauf en conserve), le trypophobe ne sera jamais poinçonneur même s’il en sifflote l’air,
Le carpophobe fuirait le paradis et les vegans (tout sexe confondu), il prise peu la gouaille de Maurice et se gausse du malheur de Blanche-Neige,
Le carminophobe passe ses journées dans les parfumeries en toussant exagérément au désespoir du phonophobe,
Qu’il préfère être un numéro plutôt qu’un homme libre, c’est là le seul choix apaisant pour l’éleuthérophobe,
« Enfin des montres molles silencieuses ! » s’exclame le chronomentrophobe devant les toiles de Dali pendant que l’antophobe brame « Les bonbons » du grand Jacques aux oreilles horrifiées de sa dulcinée….
Si vous croisez un chauve ravi, imberbe et reniflant ses aisselles lisses, sachez qu’il s’agit probablement d’un trichophobe ou un autre qui démembre un mannequin, n’y voyez pas forcément un pervers mais plutôt un pédiophobe( à moins qu’il soit bi-polaire…),
Le butyrophobe déteste le film de Bertolucci : « Le dernier tango à Paris » et le sidérodromophobe ne prendra jamais le dernier métro,
Le basophobe vagit en quadrupède nostalgique tandis que le papétolétophobe rugit dans les toilettes en lacérant le PQ sans l’utiliser(ce phobique fait le bonheur des boutiques de sous-vêtements, moins de ses proches collaborateurs…),
Comment oublier l’hexakosioihexekontahexaphobe qui joue aux 3 dés à 5 faces, a peur quand Lévy attend et refuse de loger dans la chambre 66 du 6ème étage,
Tant d’autres phobies terrifient les citoyens lambda, pour ma part, en fidèle disciple sceptique de Pyrrhon, de Montaigne et d’Erasme, aucune ne m’atteint sinon tout ce qui n’en est pas…
Mais que vois-je, un essaim de féroces montgolfières à tête de chou-fleur et aux dents acérées se précipiter vers moi en vociférant « Les Walkyries »!
Au secours, help, hilfe, socorro, aiuto, alnajda, pomogite, voithea, amis pentecôtistes, au secours!