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Giovanni BENINI

L'héroïne des péquenauds

L’écriture est tremblante et le mort en sursis
Au fond de cette mine où rampe l’agonie :
« Hellen, mon bel amour, je te fais mes adieux,
Nous mourrons tous un jour, je n’ai pu faire mieux »
Le grisou explosa en ce beau mois de mai,
Plus de deux cents houilleurs rôdent dans un musée,
On y suit l’histoire de Jacob L .Vowell,
Qui toujours se souvint qu’il n’était qu’un mortel.

Welsh* fut une ville pétulante et prospère.

Il y avait certes la compagnie minière,
Les fils des ténèbres creusaient les galeries
Pour en extraire l’or aux noires asphyxies,
Dans des râles glaireux, trop tôt, ils trépassaient,
Recrachant de leur corps ces carats convoités
Par des nobles saigneurs qui, toujours aux aguets,
Troquaient sans vergogne ces vies contre un billet.

Mais les Appalaches s’étendaient au soleil
Et Welsh, une ville pétulante et prospère.

« L’homme n’a pas tissé la toile de la vie,
Il n’est qu’un frêle fil qui s’envole à tout vent,
Notre terre vaut mieux que tout ce vil argent
Et sera toujours là, quand nous serons partis,
Nos jeunes gens jamais n’auront à travailler
Car ceux qui travaillent ne peuvent plus rêver ,
Ô grand Wakan Tanka****, que fait donc l’homme blanc ?
Il profane sa mère et s’accouple au néant ».**

Welsh fut une ville pétulante et prospère.

On entendait au loin, sur le chemin de fer,
Siffler ce beau refrain :« Venez vous étourdir ! ».
Des vagues affluaient gorgées de tout désir
Les enseignes crépitèrent de sortilèges,
Chacun s’abandonnant à ce furieux manège…
Bientôt, les gonfalons seront tout rapiécés
Quand les dents du malheur les auront arrachés.

Mais les Appalaches s’étendaient au soleil
Et Welsh, une ville pétulante et prospère.

« Portes du paradis, rivières et montagnes
Que sillonnent gaiement les routes de campagne,
Ma douce Virginie, toi l’adorée des cimes,
J’entends souvent ta voix dans les forêts sublimes,
J’ai longtemps erré seul sur tes vertes collines
En ces temps où l’amour a fui dans les ravines ».***
Ils t’ont bien mutilée en scalpant tes sommets,
À grands coups d’explosifs et de bouteurs grossiers .

Welsh fut une ville pétulante et prospère.

Neil Heizer s’est éteint devant son grand écran,
Il en avait sniffé de ces médicaments !
La paye des cinglés, ce fut son cimetière…
Prisons et hôpitaux sont les seuls survivants,
D’une cité fantôme où traînent des gisants.
Après les saccages, les temps sont au naufrage,
Les flibustiers partis, on avoue le carnage,
Adieu ma Virginie, ô terre désolée,
Par les rats du charbon, complètement rongée,
Enfin, il restera pour tous tes péquenauds,
Quelque poudre blanche à ingurgiter sans eau !

Mais les Appalaches s’étendaient au soleil
Et Welsh, une ville pétulante et prospère.



*Welsh fut une ville minière en Virginie qui compta jusqu’à 100.000 âmes,depuis le départ des Compagnies, il en reste 2180 vivant misérablement…

**Paroles indiennes

***Chansons populaires de Virginie

****Grand esprit amérindien