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Giovanni BENINI

Dédoublement monacal

Quelle fenêtre frémissait d’effroi
Quand passait Ambrosio, le moine fou
Tourmenté par une brume rouge
D’où jaillissaient des clameurs atroces?
Incestueux, impudique débauché
Combien de fois, s’était-il pendu
Aux arbres décharnés comme de spectres
Hallucinés par la reine de la nuit
Qui leur décochait furieuse ses traits d’argent.
Mais le maudit n’était-il pas condamné
A revivre l’enfer de ses péchés
Que Lucifer lui avait accordés
A la condition de lui concéder son âme
Toutefois si corrompue que le cornu fut dupé!
Restait alors ce châtiment raffiné:
Lui offrir ce que tout humain convoite;
L’éternité, bien sûr, mais celle de ses vices,
De ses horreurs, de son désespoir suicidaire,
Car à quoi bon l’immortalité
Si la conscience, ce bourreau implacable
Tenaille férocement la chair souillée?
Quelle fenêtre frémissait d’effroi
Quand, sorti des ténèbres infectes,
Un oeil rageur se collait à la vitre
Cherchant a assouvir une ultime perversion
Mais la maison est vide, Ambrosio,
Ces habitants t’attendent au cimetière
Pour un banquet funèbre où jamais tu n’iras!
Quand tu te réveilleras de ce cauchemar,
Quand dans ce miroir tu me verras,
Quand, vêtu de ta soutane, tu reprendras ta route nocturne
Qui jamais ne trouvera une aube,
N’oublie pas d’emporter ta corde pour me pendre!