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Giovanni BENINI

Cauchemar à venir

Pendant que mes années filaient dans un train sans retour,
Que je cherchais ma mémoire au fond des étoiles bleues,
La forêt sauvage et ses clameurs têtues
En échos puissants étreignaient mon vieux cœur,
Je me voyais soudains courir à perte haleine,
Les yeux écarquillés par les doigts de la peur,
Le corps nu frissonnant sous une toison grise
Et ce goût de sang chaud qui écoeurait mes lèvres,
Les racines poisseuses comme des boas noirs
Entortillaient mes pieds dans de longs sifflements,
Les branches griffues des arbres squelettiques
Perçaient atrocément ma chair si convoitée,
Parfois des serres cruelles hullulaient dans les airs,
Des flammes sans paupière piquaient mon dos flétri,
Là-haut, les lourds nuages aux perfides lueurs
Grondaient tels des molosses avides de carnages,
Par-delà les grandes ombres menaçantes,
Brillait de son éclat livide et venimeux, l’astre tant redouté,
Idole des sorcières qui suscitaient l’effroi
Dans un silence funèbre.

Et soudain, le fracas de cris et piétinements,
Des aboiements furieux et la voix véhémente
Qui semblait m’appeler d’un gouffre insondable :
« Lycaon, Lycaon, où sont donc tes enfants,
Les as-tu dévorés dans ta rage possessive,
Les as-tu donc privés d’un avenir radieux,
Toi qui te pris pour Dieu par ta science fautive,
Te voilà transformé en monstre abhorré,
Toi, le chasseur imbu de trophées usurpés
Te voilà le gibier de tes pauvres héritiers
Qui sans répit, te poursuivront
De leur haine féroce forgée dans la souffrance
Et ne pourront jamais pardonner tes saccages ».
Quel hurlement profond m’a alors réveillé
Dans cette chambre obscure où un miroir brisé
Reflétait l’image d’une bête apeurée,
Seule, abandonnée jusqu'à la fin des temps
Dans le champs nocturne d’une nuit sans visage…