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Gabriel Goldbaum

Europe, sœur blessée

Europe, ô ma sœur blessée
Europe, cette Europe – ô vieux rêve d’airain !
Sur les champs endeuillés, des sillons de chagrin,
Ton visage façonné par les coups du canon,
Portant haut l’étendard mais saignant sous ton nom.

Partout et nulle part – ta paix fut achetée
Au comptoir des douleurs, en monnaie de sang versé.
Tant de cris, tant de morts, quel prix pour ce silence ?
Europe, ma vieille sœur, où donc est ta conscience ?

Ton unité fragile est née d'un long orage,
Bercée par la tempête, enfantée dans la rage.
Tu cherches ton visage au fond d'un vieux miroir,
Mais vois-tu l'avenir ou ton passé trop noir ?

Identités perdues, identités ferventes,
Luttent encor en toi, âpres, contradictoires, ardentes.
Tu es Rome, Berlin, tu es Prague et Paris,
Chaque patrie en toi crie son orgueil meurtri.

Où donc est la douceur, où donc est la sagesse ?
Europe, écoute encor cette ancienne promesse,
L’unité en ton sein doit surgir lentement,
Non dans l’oubli du sang, mais dans son reniement.

Seule nous parle encor cette paix chancelante,
Jamais le calme fixe, mais l’ivresse brûlante,
Cette paix des débuts qu’on cherche en gémissant,
Car sa force fragile vit dans le mouvement.

Réconcilie-toi donc, ô mère déchirée,
À tes peuples divers, ta mémoire écorchée,
Et dans l’écho confus d’anciennes tragédies,
Reconstruis doucement ta douce harmonie.

Europe, ô ma sœur, mon tourment, mon espoir,
Trouve enfin dans l’union la lumière d’un soir,
Non pour oublier, mais pour tendre la main,
Pour que ton vieux sanglant hier devienne demain.