Vos
poèmes

Poésie Française : 1 er site français de poésie

Vos<br>poemes
Offrir
ce poème

Etienne CHAMPOLLION

Lettre à Héloïse

Je vous écris lointain à l’encre de ma nuit,
Au sanglot de l’horloge un cœur évanouit,
Qui s’en va vain, fourbu, au creux d’une clairière,
Relire votre adieu dans l’eau de la rivière.
Ha que l’adieu est dur et qu’il marbre mon cœur !
Perfide, l’eau du temps s’est fait de nous vainqueur,
Ecoulant notre amour comme un tranquille fleuve,
Mais sa source éternelle aujourd’hui se fait veuve.
Tout jeunes nous voguions comme main au piano,
Composant, amoureux, au pays de Giono,
Ballades et morceaux, sonates amoureuses,
Mais le violon est mort et mes mains malheureuses,
Rappelez-vous le temps, intime, silencieux,
Où se posait la fleur, tout droit venant des cieux,
De rose ! émerveillant votre peau nue éteinte
Du moindre vêtement, à mon corps une atteinte
De mille et un plaisir où comme à l’unisson,
Nous partagions alors le même grand frisson.
Ah, mais le temps passe et le frisson se couche,
Ne revenant jamais à ma porte, à ma bouche,
Vous êtes loin, valsant, dans d’autres bras mystiques,
Et moi seul, enlacé à des vents nostalgiques,
Laissez-moi seulement une nuit, un instant,
Prendre votre regard, votre charme éclatant,
De mes yeux qui ne voient à présent que des larmes,
Sans le moindre parfum, à sonner les alarmes,
D’un cœur au désespoir de ne plus vous revoir,
D’une âme qui n’avait que vous en seul devoir.
Ah que vous êtes loin, ainsi que ma jeunesse !
Que belle vous étiez, dans les mots, la finesse,
L’harmonie infinie à qui l’on doit ces soirs,
Où tout vient se confondre, amour, parfums, espoirs !
Mais l’espoir n’est plus là, l’amour n’est qu’ombre morte,
Seul un vent parfumé vient souffler à ma porte,
M’emportant dans ces vers, cette lettre de nuit,
Où s’écrit mon passé, mon bonheur d’une nuit,
De vous apercevoir rien qu’au coin d’une rue,
Un visage, un sourire, une amour disparue,
Qui m’envole toujours vers des cieux passés,
Où je vous aime, où mes sonnets sont embrassés,
A votre souvenir, à votre doux visage,
A notre amour perdu, infini paysage !