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Emile DUCHARLET

Et l'or de leurs corps

C’est dans le miracle de l’arche, la croupe arrondie des collines, l’ondulation des blés, ou bien encore dans la plénitude du cercle qu’il nous faut chercher l’essence même de la beauté. Mais dans cet insondable mystère, sans doute n’existe-t-il séduction ni harmonie plus grandes que l’ostentation d’un corps féminin.
Ainsi, à l’orée des taillis luxuriants, ce duo de vahinés complices, assises à la mode tahitienne, qui affiche des splendeurs différentes, d’âge mûr et de jeune fille, mais d’une égale perfection pour interdire tout dévolu : L’une dévoile les charmes de la Dryade secrète des sous-bois, baignée des senteurs du bananier sauvage et des gardénias, nymphe des sources vives, au ventre lisse de vallée fertile, aux seins de dunes aquatiques et de rubis ciselés, au sexe d’orage, aux cuisses de contrescarpe...
Dans la gémellité, l’autre nous rappelle une Néréide des mers chaudes, aux coulées d’or fauve, fille du soleil et des sèves printanières, à la peau douce de monoï et de canne sucrée, aux hanches souples de pirogue à balancier...
Sculpturales et sensuelles, dans la proximité des criques amarantes, comme deux fleurs déposées par la bienveillante Providence sur ce rivage où elles paressent en attendant l’amour, elles dévoilent ici l’étrange paradoxe d’une insolente beauté.
En comparaison, diamants, émeraudes, gemmes rares ne sont qu’insignes verroteries, crachats de magmas rocheux dont les reflets trompeurs n’ont d’autre préciosité que leur fonction de parure.
De même, l’or le plus pur ne vaut mieux que le bronze qui est sans plaisir et sans joie.
La beauté se conçoit nue, sans voiles, sans artifices et jamais n’est impudique.
Elle se veut libre aussi, dans l’entrelacement des lianes.

Emile Ducharlet
Extrait de "Douze poèmes symbolistes, dans les pas de Gauguin"