On raconte qu'un apatride À l'époque de l'Énéide Traversait un désert brûlant, Mais que la chaleur l'accablant, Il s'abrita dans une grotte Soufflant une humidité forte. Quand soudain apparait un lion ! Sans aucun dessein d'agression : Sa patte suppurait, blessée Par une épine encor plantée. Tenaillé par cette douleur, Le lion mendiait une faveur. L'homme ôta la méchante épine Sans craindre du lion les canines. Dès lors, ils devinrent amis. L'homme fut amplement nourri : Chaque jour, le lion de la chasse Rapportait quelque viande grasse. Ils vécurent heureux longtemps Jusqu'à ce qu'un événement (Qu'il serait trop long qu'on explique) Fit de l'homme une proie du Cirque. Devant Rome assoiffée de sang, L'homme chancelait tout tremblant. On ouvre la cage des fauves : Les esclaves en vain se sauvent. Or le lion, capturé depuis, Se trouvait dans ces jeux inouïs ! Il aperçoit son ami l'homme, De joie saute sur lui, rayonne. Tout le Colisée s'ébahit, César lui-même est interdit. Il fait mander la chair de foire, Qui lui raconte son histoire. Ému par ces liens amicaux Avec le roi des animaux, César affranchit tout de suite L'homme sans les formes du rite, Et lui donne son compagnon. Depuis, à Rome, l'homme au lion Marcha librement dans la rue, Suivi de la bête qui tue.