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Cypora Boulanger

Ils n'étaient venus là

Ils n’étaient venus là que pour danser encore
Et la musique était leur plaisir quotidien,
En offrant à leur âme un halo magicien
Pour qu’ils aient le loisir de conjurer le sort.

Brusquement, la rumeur a rempli la campagne
Et la brume, à son tour, colonisa les lieux
En occultant les bois, les prairies, les montagnes,
Ecartelant l’automne à l’orée de leurs yeux.

Puis les feux de l’enfer déchainèrent leurs hordes
Et l’on n’entendit plus qu’une vile rengaine
Qui se mit à grincer telle une rouillée chaine
Tirant, à hue à dia, sur une atroce corde !

Et la rumeur enfla jusqu’à la déchirure
Puis courut apaiser ses besoins sur leurs corps,
La musique se tut, lui succéda alors
Un écho furieux menant à leur torture !

Courir pour se cacher fut leur lot immédiat,
Appeler leurs parents, s’abriter des vautours,
Mais personne ne vint, ni soldats, ni secours,
Et paniqués, traqués, ils se sont couchés là !

Certains ont écopé de la suprême peine
Quand le feu dévorant de la duplicité
Les prit dedans ses rets flouant leur liberté
Et couvrant les cailloux du sang chaud de leurs veines.

A d’autres, ce qu’on fit, ô sadiques supplices,
Tels des pantins brisés aux mains de leurs bourreaux,
On les a violés, mis au fond de cachots,
Affamés, assoiffés, lèchant leurs cicatrices !

On les cherche partout, même sous la mitraille,
Où sont-ils à présent ? Sont-ils morts ou vivants ?
Les soirs où l’horizon endeuille la bataille
Leurs esprits caracolent sur le dos du vent.

Qui donc leur a donné la force et le courage
D’affronter vaillamment et sans s’en détourner
Ces scélérats bruyants, terriblement sauvages,
Qui ont franchi ici leurs lignes en secret ?!

On n’entend même plus les oiseaux qui jacassent
Quand retentit au loin le boulet du canon ;
On ne voit plus fleurir sous les détonations
Que des œillets sanglants dans un éclair fugace.

En ces jours de fiel gris où des justes se battent
Contre l’obscurité, des mains aux doigts croisés
Lancent à l’unisson vers les cieux écarlates
Des appels éperdus, véhéments, accablés.