Plaisirs
Quand nous nous retrouvons après un temps d’errance,
L’un de l’autre éloignés sur des chemins divers,
J’aime cette pudeur teintée de connivence
Que je lis en croisant le champ de tes yeux verts.
Souvent, dans ces soirs-là, nous prenons une table
Dans la salle animée d’un petit restaurant
Où, cachés dans un coin, nous trouvons délectables
Que tu sois ma diva et moi ton soupirant.
Tout bas, nous évoquons mille petites choses,
Des bribes de nos vies passées dans la pampa,
Les histoires, les gens, les tableaux qui composent
Un pan du quotidien où l’autre n’entre pas.
Nous goûtons à l’envi les plats qu’on nous apporte,
Décelant les saveurs intimement liées
Et piquant au hasard chez l’autre, de la sorte
Que nos adéquations en soient multipliées.
Le vin resplendissant qui rougeoie dans nos verres
Colore l’atmosphère et nos tendres propos,
Nous procurant la douce ivresse qui libère,
De nos inhibitions, les derniers oripeaux.
Ensuite, dans les rues, nous tenant par la taille,
Nous déambulons pour un peu nous dégriser,
Riant facilement si quelquefois déraille
Notre pas résolu mais désorganisé.
Et quand nous retrouvons le havre domestique,
C’est mutuellement pour nous déshabiller,
Dans des bruits de baiser, d’agrafe et d’élastique,
Et voir nos vêtements partout s’éparpiller.
Alors, nous basculons sur le lit qui nous happe
Afin d’y consumer la fièvre du désir
Et, repus de regards, de parole et d’agapes,
Encore partager le meilleur des plaisirs.
Mais je ne savais pas, à l’heure de les vivre,
Que tous ces bons moments pouvaient se compléter
Et n’espérais pas voir leur magie se poursuivre
Dans ce dernier plaisir d’ici les relater.
