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César DUBON

Les gares

Ma jeunesse brouillonne a été abreuvée
Par la fréquentation entêtante des gares,
Des gares de départ, de transit, d’arrivée
Où tant de destinées se croisent, se séparent.

Les électriques soirs et les matins brumeux,
Combien j’en ai connu de ces lieux de partance
Où l’on a bien souvent le cœur un peu vaseux
Mais où l’on fait parfois sa nouvelle naissance.

A la fin du voyage, en descendant du train,
Je découvrais les murs d’une ville étrangère
Ou prenant le trajet à rebrousse chemin,
Je rentrais à bon port, la conscience légère.

Que de fois, exilé loin du chéri bercail,
Rongé de nostalgie et l’espérance en cage,
Mes pas me conduisaient vers la maison du rail
Pour rêvasser devant les panneaux d’affichage ;

Où immobilisé au milieu de la nuit,
Entre correspondance et horaire à poursuivre,
Dans un hall vide et froid, je meublais mon ennui
Bourrelé de sommeil dans les pages d’un livre.

Si j’affrontais alors ce flot d’heures perdues,
C’était souvent ma mie pour aller te rejoindre,
Dans le capharnaüm de nos vies distordues,
Par avance goûtant le moment de t’étreindre.

Or c’est dans une gare, un fameux jour d’hiver,
Belette, que vainquant ta nature rétive,
Pour la première fois – souvenir tendre et cher –
Tu es venue baiser mes lèvres attentives.

Et c’est dans une gare aussi, rappelle-toi,
Au milieu des passants bruyants et volubiles,
Que, les yeux embués, une dernière fois,
Tu es venue t’enfouir entre mes bras fébriles.