Le sans logis
Il était vieux, bossu, barbu,
Cheveux hirsutes, œil délavé,
Il bégayait, avait trop bu,
Trop bu d’amère liberté !
Il était tendre, c’n’est pas peu dire,
Son cœur battait sous ses haillons,
Il quémandait dans un sourire,
Une pièce ou deux pour son litron !
Il agaçait, peu nous dérange,
Quand de la main il implorait
Un peu d’une attention étrange,
Pour nous montrer qu’il existait !
Il avait élu domicile
Sur deux cartons superposés,
Entre deux entrées de la ville,
Pour ne pas trop nous déranger !
Il adossait de temps en temps
Le poids pesant de sa misère
Contre le mur en s’excusant
De vouloir fermer les paupières !
Il avait pour bien une besace
Qui recelait tous ses trésors,
Un rosaire et un bris de glace
Qui reflétait son pauvre corps !
Il est parti un soir de neige,
Tout doucement sans faire de bruit,
Pour lui pas besoin de cortège,
Rien qu'un cri de douleur dans la nuit !
De son passage, rien ne subsiste,
Ni besace, ni rosaire égrené,
Sa place est nette il ne persiste,
Que ses rêves échevelés !
Il était vieux, bossu, barbu,
Cheveux hirsutes, œil délavé,
Mais vous, vous ne l’aviez pas vu,
Il était l’ombre de ses regrets !...
28 avril 2008