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Alycia Bellaire

Le Salut

Me voilà.
Seule.
Plongée dans le silence de la nuit.

J’essuie les perles qui roulent sur mes joues pour apercevoir l’encre couler sur le papier. Je songe à tout éteindre pour que l’obscurité reflète mes pensées.
« C’est de ta faute. Tu en demandes trop ».
Sans doute.


Penses-tu simplement à moi ?
Qu’importe que ça soit en bien ou en mal. Tant que j’occupe, ne serait-ce qu’une petite place dans tes pensées.
Parce que toi, tu inondes les miennes.
J’aimerais qu’elles se retirent, comme la marée, mais elles ne font que déborder aux coins de mes yeux. Elles coulent et coulent encore. Elles ne s’arrêtent plus.


De toute façon, après la tempête vient toujours la pluie.

Et puis vient ce moment où l’on se voit comme un poids, pas seulement un petit caillou dans la chaussure… Non, plutôt comme une pierre de trop sur cette terre.

Peut-être que je ne suis qu’une goutte d’eau perdue
dans l’océan du monde.

Et que personne ne remarquera vraiment quand cette goutte s’évaporera.
Je crois bien que la vie est trop amère, trop rugueuse pour moi.


Je regarde ces lignes sur mon poignet,
comme un ruisseau discret
qui serpente sous la surface de ma peau,
un tracé intime
laissé par la douleur en silence,
un sentier secret
que seuls mes yeux savent suivre,
un entrelacs
d’ombres et de lumière,
une constellation unique
qui raconte mon histoire muette.

Puis mon regard glisse vers le foulard, posé là, silencieux… Je l’imagine
s’enrouler doucement autour de mon cou, m’étreignant dans mes derniers soupirs, m’embrassant dans cette dernière douleur.
Derniers gestes, dernières pensées… enfin.


Après tout, toute histoire trouve sa fin, n’est-ce pas ? Et si la mienne se dessinait maintenant ?
Pour une fois,
Je tiens la plume.
J’ai le contrôle absolu sur l’intrigue, sans les caprices du hasard, sans les doutes et les suppositions. Juste une vérité qui m’appartient, un poids solide posé uniquement sur moi.


Quand on pense à tout arrêter, au début, on pleure.
Une larme pour la forme, une révérence de façade.
Mais maintenant ? Je pourrais presque en rire. Quelle chute élégante, non ?
Après tout, quelle logique plus parfaite
que de devenir son propre bourreau et sa délivrance. Enfin tenir le fil de l’histoire, sans plus rien devoir au hasard, sans promesses creuses, sans faux espoirs.

Ça pourrait être bref, comme un claquement de doigts, ou s’étirer, juste assez pour savourer une dernière fois ce grand inventaire de mes ratés, ces rêves laissés en jachère, ces victoires jamais cueillies.
Peut-être que je voudrais ça, oui :
un dernier regard, acide et lucide, en sachant que c’est bel et bien fini. Et puis s’effacer, sourire aux lèvres, comme on claque la porte d’une pièce trop sombre.
Quitter la scène avant que le décor ne s’effondre pour de bon.
Un dernier mot, un dernier soupir —
et cette fois, c’est moi qui écris le point final.


C’est étrange mais rien qu’à l’imaginer, mon cœur se calme. Soudain, les voiles se lèvent et tout devient limpide : la brume s’est dissipée. Ce deus ex machina qui surgit pour clore l’histoire que je ne savais plus écrire.
C’est la seule issue, elle me sourit et me tend la main. Je ne lutte plus.

La solution est là.
Sous mes yeux.
Enfin.