Les grands
classiques

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Les grands<br>classiques

GUY RANCOURT
1841 - 1909

Adèle, Adeline et Delphine

Adèle, Adeline et Delphine
ce sont les prénoms des trois belles cousines
petites elles jouaient et partageaient presque tout ensemble,
grandes elles décidèrent de voler de leurs propres ailes !

Puis arriva le jour où Adèle s’envola en Argentine,
Adeline aux Philippines
et Delphine, elle, pour le Sud de la France aux Vaugines.
Que sont-elles devenues les trois belles cousines ?

Que sont-elles devenues dans leur nouvelle vie ?
Quel rêve poursuivent-elles ? Pourquoi ce goût pour l’inconnu ?
Sont-elles heureuses ? Tristes ? Ou déçues dans leur projet ?
Et cet appel vers des pays étrangers ? Si loin de leur pays natal !

(…)

Adèle se promène sous une ombrelle au bord de la mer.
Veut-elle se protéger du soleil ou du regard insistant et ébahi
du cavalier derrière elle ? Tournera-t-elle la tête ?
Elle hésite et se demande si cela en vaut encore la peine,
elle qui a sacrifié sa jeunesse et ses airs de princesse.
Aurais-je été plus heureuse auprès des miens, se demande-t-elle ?

Adeline travaille sans arrêt dans son atelier de porcelaine.
Parfois elle lève les yeux au ciel et que voit-elle entre les nuages ?
Tout ce bleu et tous ces oiseaux qui sillonnent ce vaste espace.
Et si l’un d’entre eux l’emportait loin au-delà de l’océan ?
Saurait-elle reconnaître le sentier qui mène au paradis de l’enfance ?

Delphine se prélasse sur la balancelle à l’ombre du grand chêne.
Rêve-t-elle à Fragonard ou à Chagall ?
Et son ex-fiancé de Grasse ? Vit-il toujours à Nice ?
Seule dans les jardins de son palais,
songe-t-elle à tous les jeux enfantins jadis avec ses cousines
près du grand fleuve Saint-Laurent ?

(…)

Pourtant Adèle, Adeline et Delphine
s’étaient promis et juré de se retrouver un jour
avant de se quitter en versant des torrents de larmes
mais parfois le destin est bien cruel et jamais, au grand jamais,
les trois belles cousines ne se sont à nouveau rencontrées
et elles reposent en terres étrangères seules et oubliées des leurs.